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l'imagination au pouvoir
9 novembre 2020

Pendant la nuit...

Doux rêves

 

-          Pauline ! fit une voix douce et ronronnante. Tu dors ?

Comme elle ne répondait pas, le chat conclut que sa maîtresse dormait bel et bien. Il quitta le niveau de ses pieds, pour venir se lover contre elle, à la hauteur de sa poitrine, qu’elle avait plantureuse. Souvent, quand il faisait cela et qu’elle était réveillée, elle posait une main sur lui, ce qui avait pour effet de le faire ronronner. Le chat comprit qu’elle était en plein sommeil, et se pelotonna dans son giron, sous la couette.

-          Pauline, je vais au pays des Rêves, tu me suis ?

Un léger ronflement lui répondit, et il ajouta :

-          Eh bien, c’est parti…

 

Pauline se sentit tirée comme d’un sommeil de cent ans. Ses longs cheveux blond vénitien s’étalèrent sur ses épaules, la rendant presque féline, dans une robe-fourreau noire. Autour d’elle, elle ne distingua rien, si ce n’est son chat, qui attendait patiemment à ses pieds.

-          Tu as mis le temps, dit-il.

-          Orphée ! s’exclama-t-elle, se penchant vers lui, et elle le prit dans ses bras.

Mais Orphée posa une patte de velours sur son nez, la repoussant doucement.

-          J’ai mieux que ça à t’offrir, déclara-t-il.

-          Et qu’as-tu à m’offrir, toi le chat de ma vie ?! fit Pauline en riant. Tu vois bien que c’est de toi, que je rêve !

-          Evidemment, c’est moi qui ai suscité ce rêve. Mais pose-moi, et suis-moi.

Pauline fit un petit baiser à son chat, puis obéit, mais en demandant :

-          Et comment peux-tu susciter un rêve ? Mais quand je me réveillerai, je serai toujours dans mon petit lit avec toi…

-          Il y a de plus  belles choses que moi à rêver, pour un humain, déclara Orphée.

-          Comment, tu ne m’aimes pas ?

-          Ce n’est pas ça. Au contraire. Mais je voudrais faire quelque chose pour toi. Tu pleures trop souvent de solitude, ça me fend le cœur.

-          Oh, Orphée ! fit Pauline, émue.

Sentant l’émotion de sa maîtresse, Orphée se retourna, pour aller se frotter à ses jambes. Pauline le caressa un peu, puis le chat lui dit de continuer à le suivre, sans trop poser de questions.

-          Mais pourquoi ? demanda quand même Pauline.

-          Les rêves ont leur logique propre. Laisse le processus se faire.

Elle lui donna encore une caresse, et c’était reparti. Deux minutes plus tard, ils arrivaient vers une petite gare, mais Pauline préféra contempler le paysage, où il y avait plusieurs petites lumières et, en toile de fond, un bord de mer, ou peut-être un lac. C’était le crépuscule, et quelques étoiles s’allumaient déjà. Elle respira à fond, et se sentit revigorée, même si elle ne savait pas très bien de quoi. Sur ce, Orphée entra dans la petite gare, Pauline sur ses talons. Il alla droit à un distributeur, appuya sur quelques boutons, puis désigna à sa maîtresse le billet qui tombait dans le réceptacle. Pauline le prit, et lut : « Fantasia. Royaume des doux Rêves, aller-retour, quai 1, voie 2 ». Elle sourit, et dit à Orphée ce qu’elle y avait lu. Bien entendu, le chat lui redit de le suivre, et cinq minutes plus tard, le train arrivait, et ils montaient. Orphée s’installa sur les genoux de sa maîtresse, qui posa une main sur lui, juste pour le toucher.

-          Et quand descendons-nous ?

-          Pas au prochain arrêt, mais au suivant. C’est le royaume d’Euterpe.

-          Le royaume de la musique ? réagit aussitôt Pauline, et elle sourit.

-          Oui, tu aimes la musique…

A ces mots, Pauline eut un soupir, pensant au claviériste de son groupe préféré, qu’elle trouvait si beau… Son sourire s’élargit, et elle décida de faire confiance à son chat, le caressa. En plus, en pensant ainsi à Matthieu, elle se sentait bien, comme si elle avait quelque chose à partager avec lui, alors que s’il était un personnage public, Pauline, elle, ne l’était pas… et de ce fait, il ne pouvait la connaître. De temps en temps, elle rêvait de lui, de doux rêves, comme il était écrit sur son billet, qu’elle avait été obligée de porter à la main, faute de poches. Et Orphée sommeillait sur ses genoux, elle ne voulait pas le déranger. Alors Pauline regarda autour d’elle, et avisa quantité de gens différents, âgés ou très jeunes. Beaucoup avaient les yeux fermés, alors elle ne dit rien. Finalement, elle fit comme eux, et descendit un peu plus tard à la station « royaume d’Euterpe », à la suite d’Orphée.

Sortant du train, elle entendait déjà des notes de musique, venant d’un peu partout. Pour autant, ce n’était pas désagréable. Orphée prit son temps, trotta vers des bancs, ou ce fut du moins ce que crut Pauline. Car près des bancs, il y avait un piano droit, avec son pianiste. Et en levant la tête vers lui, Pauline reconnut Matthieu Paucard, l’air habité, tout à sa musique. Elle en tomba assise sur un banc. Il improvisait, les yeux mi-clos, sans doute pour mieux se concentrer. La musique était limpide, joyeuse, avec quelquefois une cassure dans le rythme. Et cela reprenait. Pauline était subjuguée. Mais au bout d’un moment, Orphée sauta sur le piano, y introduisant du même coup des notes discordantes.

-          Oh ! Un chat ! Mais tu es beau comme tout !

Orphée se laissa caresser, manqua tomber et Matthieu éclata de rire, tout en se tournant vers lui, et il avisa alors la créature en fourreau noir sur le banc.

-          Je te présente ma maîtresse, déclara Orphée, après s’être repris très dignement. Elle s’appelle Pauline, et rêve de te rencontrer.

Pauline rosit, à ces mots.

-          J’aime beaucoup ce monde où les chats parlent, et où les femmes sont belles, dit Matthieu, et il se leva du tabouret.

-          Zut ! lança quelqu’un qui passait là. Il n’y a plus de pianiste !

-          Il ne tient qu’à vous de me remplacer. Ou à quelqu’un d’autre. Moi, je viens de rencontrer Anita Ekberg… rétorqua Matthieu tandis que Pauline rougissait de plus en plus, et il se tourna vers elle. Ce rouge aux joues vous va très bien. Je crois que je viens de rencontrer la femme de mes rêves…

Mais ni l’un ni l’autre n’osait se toucher. Malgré de petites poignées d’amour, Matthieu était plutôt beau garçon, et avait surtout un sourire magnétique. Il repoussa ses cheveux en arrière, tendit une main vers Pauline.

-          On rencontre toujours du beau monde, dans les gares, dit-il encore.

Orphée eut un léger « au fait, jeune homme ! » qui fit sourire sa maîtresse.

-          Et c’est pour ça que vous jouez de la musique ici ? demanda-t-elle.

-          Oui, mais aussi parce que j’aime beaucoup cela. J’aime tester nos compositions ainsi. Et, le matin, je les transcris pour Broken beat… Et vous, quel métier faites-vous ? Vous avez l’air plus âgé que moi… 

-          J’ai quarante-et-un ans, et je suis clerc de notaire. Mais mon rêve est de jouer de la guitare dans un groupe de rock.

Matthieu s’éclaircit la gorge.

-          En effet, je n’ai que trente-trois ans… Mais vous ne faites pas votre âge.

-          Merci.

-          Vous êtes magnifique.

Et il s’enhardit à saisir la main de Pauline, qui se laissa faire, chavirée. Le style rock n’roll de Matthieu lui plaisait, décidément.

-          Vous aussi, vous… commença-t-elle, puis elle baissa les yeux, et Matthieu eut un sourire resplendissant, et la prit dans ses bras pour l’embrasser.

Pauline décida de se laisser aller. Orphée les regarda, puis décida de faire une toilette, avant de se frotter aux jambes de sa maîtresse.

-          Tu as raison, on fait de très belles rencontres, dans les gares, dit cette dernière à Matthieu.

-          Miaou !

Le ciel commençait alors à s’éclaircir, et Orphée insistait, à se frotter à Pauline, à ronronner, à miauler. Tout à coup, elle ouvrit grand les yeux, et posa une main sur le chat ronronnant, complètement détendu tout contre elle.

-          Il est encore sous ma couette, ce filou ! fit Pauline dans un éclat de rire.

Mais elle regarda son réveil, et se rendormit. Quand ce fut l’heure de se réveiller, elle se sentait resplendissante, à cause de son rêve avec Matthieu. Elle dut faire un petit effort pour se concentrer, une fois au travail, et puis la journée fila vite. Dès que Pauline fut chez elle, elle alla faire un câlin à son chat, qui ne demandait pas mieux.

-          Et les chats, de quoi rêvent-ils ?

-          Rrr…

-          C’est dommage que tu ne parles plus… Rendez-vous ce soir, mon Orphée ?

De bonheur, le chat fermait les yeux. Ses journées étaient si longues, sans sa maîtresse ! Mais une fois au lit, il la prit au mot, peu après que Pauline se soit endormie. Alors il guetta le bon moment, et revint tout contre elle.

-          Je crois  que tu veux partir retrouver Matthieu à Fantasia ?

-          Alors ça s’appelle Fantasia ? Le pays des rêves ?

-          Oui. C’est parti, alors ?

-          Oui mon bel Orphée.

Le rêve se passa comme la nuit précédente, et cette fois, Pauline et Matthieu sortirent de la gare du royaume d’Euterpe, main dans la main. Cette nuit-là, Pauline était vêtue de cuir, et ils allèrent s’asseoir face à un lac, tandis qu’au loin, on entendait une guitare. Ils se bécotèrent, échangèrent des paroles d’amoureux, mais jamais longtemps. Pauline se réveillait aux premières lueurs du jour, puis se rendormait, sourire aux lèvres, Orphée dans son giron.

Le samedi suivant, elle put enfin paresser au lit, s’imaginant réellement dans les bras de Matthieu, comme dans ses rêves. Orphée la regarda, les yeux mi-clos, comme s’il comprenait ce qu’il se passait dans l’esprit de sa maîtresse. D’ailleurs, elle se mit à le caresser, alors il s’étala sur le dos, pattes en l’air, pour se faire masser le ventre. Cela amusa Pauline, qui ne se lassait pas de le caresser ainsi, et elle retarda le moment du lever. Elle avait le temps, ce n’était que l’après-midi, qu’elle ferait les vitrines avec sa sœur. En attendant, elle remplit la gamelle du chat, et prit son petit-déjeuner, tout en pensant toujours à Matthieu. Elle en oubliait presque de savourer ses tartines, imaginant des caresses qu’elle n’avait pas éprouvées depuis des années. De dépit, après avoir été trompée, elle fuyait plutôt les hommes. Son fantasme l’arrangeait, finalement. Et pourtant elle rêvait, se dit-elle en regardant son chat manger, ou mettre une patte dans sa gamelle d’eau. Mais en réalité, cela la fit sourire. « Sacré Orphée », se dit-elle.

L’après-midi, elle retrouva sa sœur, Christelle, à l’endroit convenu. Cette dernière se félicitait que sa fille ait préféré aller avec ses copines, et que ses fils se fichent pas mal des courses en ville.

-          Ce sera juste toi et moi ! conclut Christelle, ravie. Entre filles !

Pauline sourit.

-          Et où veux-tu aller ? demanda-t-elle.

-          Pour commencer, dans un magasin pour les grandes tailles ! Ma pré ménopause me joue déjà des tours...

En effet, si Pauline était gironde, sa sœur l’était encore davantage, mais toutes deux restaient coquettes, misant sur les accessoires, joliment maquillées sans être tape-à-l’œil. Et cela produisait son petit effet sur la gent masculine, ou même sur leur entourage proche. Oui, on pouvait dire que les deux sœurs étaient belles.

-          Et qu’en dit Hervé ? s’enquit Pauline.

-          Qu’il est toujours fou de mes courbes. Mais s’il veut m’emmener à Djerba, je lui demanderai une djellaba, parce que là-bas, ça risque de plaire…

Pauline eut un soupir. Elle était tout de même plus mince que Christelle, et croyait que plus personne ne la regardait, passé quarante ans. Sauf peut-être les Tunisiens ?

-          Allez, ne fais pas cette tête, sœurette. Toi aussi, tu finiras bien par trouver quelqu’un…

-          Sauf en rêve, j’ai laissé passer la chance, dit Pauline en pensant à Matthieu.

-          Ah ! Tu es amoureuse !

-          Peut-être, admit Pauline.

-          Tant mieux ! Raison de plus pour nous habiller, même si l’essentiel, c’est ce qu’il y a en dessous ! fit Christelle en riant.

Toutes deux eurent un petit rire, et s’ébranlèrent en direction d’une rue commerçante, commentant ce qu’elles voyaient, s’arrêtant sur les vitrines de chaussures. Christelle rêvait de talons hauts, mais n’osait plus en porter depuis qu’elle avait tellement grossi, craignant de perdre l’équilibre. Alors en faisant cela, elles plaisantaient, se chambraient gentiment. Devant une boutique de vêtements sexy, Pauline se prit à rêver sans s’en rendre compte, murmurant :

-          Si Matthieu voyait ça… sur moi…

-          Ah ! Il s’appelle Matthieu !

Pauline se sentit rougir jusqu’aux oreilles.

-          Allez ! On entre ! fit encore Christelle. Qu’il voit comme tu es jolie !

-          Oh, je…

Pauline respira un bon coup, se reprit

-          Il ne le sait pas, expliqua-t-elle.

-          Donc tu veux l’aguicher ! Rien de tel qu’une jolie petite robe mettant tes formes en valeur ! Tu vas voir.

Et Christelle entra dans la boutique. Pauline se sentit obligée de la suivre, mais elle était gênée, et se traitait intérieurement de tous les noms. Elle essaya la robe, qui était fort courte, alors elle la jugea quelque peu indécente, et ne la prit pas.

-          Ça ne fait rien ! fit Christelle. On va chercher quelque chose d’autre. Pour plaire à Matthieu !

Pourtant, Pauline s’entendait bien avec sa sœur, qui était une femme en or, juste un peu exubérante… Mais elle se mit à faire la tête et, quand elles eurent fait leurs emplettes, elle refusa l’invitation de Christelle à boire un verre en terrasse, sachant que celle-ci voudrait lui tirer les vers du nez. Elle eut le temps de trouver une excuse, et prétendit avoir la migraine, pour repartir chez elle avec une jolie jupe et quelques bijoux, un magazine. Christelle la crut, ayant vu l’air qu’elle avait, et la raccompagna chez elle en lui disant de prendre soin de sa santé.

-          Tu es une vraie petite mère, reconnut Pauline.

-          Oui, mes fils disent ça aussi…. fit Christelle avec un sourire.

-          Tu les embrasseras pour moi, ainsi qu’Hervé bien sûr…

-          Je n’y manquerai pas ! Je t’appellerai demain pour savoir si ça va mieux.

-          Oh, il n’y a pas de raison… Merci.

-          Et je verrai Orphée une autre fois ! Ton petit tigre !

-          Alors tu feras aussi une caresse à ta Moufle.

-          Oh oui !

Et Christelle partit en riant. Pauline monta à son étage, sans que l’idée de Matthieu ne l’ait quittée. Elle s’affala sur son canapé, et pleura à gros sanglots. Orphée vint très vite la rejoindre, penchant la tête, prenant un air crâne et langoureux à la fois. Au bout d’un moment, à travers ses larmes, Pauline le vit, et craqua.

-          Mais qu’est-ce que tu es mignon, mon Orphée !

Il sauta à côté d’elle, s’offrit à la caresse, et elle se laissa faire, ce qui finit par sécher ses pleurs. Puis Orphée se serra contre sa maîtresse, et se mit à ronronner. Pauline remit une main sur le poil fauve du chat, et le remercia tant et plus, ajoutant :

-          Quel dommage que, dans la réalité, tu ne parles pas...

-          Mrâou ?

Et Orphée ferma les yeux, puis s’endormit sur le canapé. Au bout de quelques minutes, Pauline se leva, tout à fait rassérénée.

-          Et ce soir, tu me ramèneras à Fantasia…

Le chat ne se fit pas faute d’obéir, la nuit venue. Et Pauline retrouva Matthieu, qui jouait Imagine sur le piano de la gare d’Euterpe. Il faillit s’arrêter en la voyant, mais les voyageurs du rêve étaient sous le charme de cette musique, et il se maîtrisa pour finir le morceau. En effet, un vieux monsieur s’était mis à chanter, pour l’accompagner. Puis Matthieu laissa la place, et serra Pauline dans ses bras, sous le regard d’Orphée. Mais ce dernier fut dérangé par une petite fille qui passait, derrière un petit chat noir et blanc. Et ce chat se mit à le regarder intensément, puis lança :

-          Orphée ! Ô Maître du Rêve ! Je suis nouveau par ici, cette petite fille apprend à se défouler sur une batterie… Peux-tu m’aider ?

-          Non, je suis en mission pour ma maîtresse, répondit Orphée, de mauvaise humeur tout à coup.

-          Mais elle est en train d’embrasser un bellâtre… Allez, quoi !!

-          Non, va voir au lac si j’y suis ! Dis-moi seulement comment tu t’appelles, et je te rejoindrai lors d’une sieste.

-          Oh, bon… je m’appelle Domino.

-          Avec qui tu parles, Domino ? demanda la petite fille. Je peux caresser ton copain ?

-          Non ! rétorqua Orphée en voyant sa main approcher, et il lui tourna le dos, levant sa queue bien droite.

-          Tu l’as vexé, Tania. C’est de ma faute. On ne doit pas gêner un Maître du Rêve, surtout s’il est en mission.

A ce moment précis, Matthieu et Pauline décollaient, et entendirent la répartie de Domino. Ils se regardèrent, et Matthieu eut un beau sourire.

-          Tu vis avec un Maître du Rêve ?

-          Je ne le savais pas… Qu’appelles-tu un Maître du  Rêve ?

-          Un chat suffisamment âgé pour aider les humains, surtout ceux qu’il aime. Donc c’est grâce à lui que tu es dans mes bras toutes les nuits.

-          Orphée a dix ans…

-          Donc il est bien un Maître du Rêve. Suis-moi, qu’on parle. Orphée !

Le chat se tourna vers Matthieu, se frotta à ses jambes.

-          Tu m’as démasqué, toi aussi, lui dit-il.

-          Viens, Tania, enjoignit Domino à la petite fille, qui avait toujours envie de caresser Orphée. Nous ferons d’autres rencontres…

La petite obéit, et partit de son côté avec son chat. Quant à Pauline et Matthieu, ils allèrent sur leur banc préféré, suivis d’Orphée, qui leur tenait la chandelle avec plaisir. Une fois assis, Matthieu prit la main de Pauline.

-          Tu as de la chance, d’avoir un Maître du Rêve chez toi. Il peut exaucer tes vœux. Nos vœux, même.

-          Comment le sais-tu ? Tu as un chat aussi ?

-          Non, mais mes parents, oui. Et ma mère est très réceptive à tout cela. Nous avons eu un chat formidable, qui a vécu presque vingt ans. Je vis toujours dans son souvenir. Maintenant, à cause de nos tournées, je ne peux plus en avoir…

-          Oh, Matthieu…

-          Je préfère quand tu m’appelles « maestro »… Je t’aime, Pauline. Je voudrais rester avec toi.

-          Avec tout ce qui nous sépare ? Et puis nous sommes en train de rêver…

-          Evidemment, je suis avec une créature de rêve, comme toi… et Orphée. Tu aimes la musique, pour donner un tel nom à ton chat.

-          C’est vrai.

-          Tu es cultivée… c’est vrai que je suis une crotte de mouche, à côté de toi, et pourtant je voudrais… euh… ta main.

Pauline sourit.

-          La voici.

Et elle saisit la main de Matthieu, la caressa.

-          Je voulais dire t’épouser, dit-il tout en répondant à son contact. Si tu le veux aussi, dis-le à Orphée. Tu serais d’accord, Orphée ?

-          Et pourquoi croyez-vous que je suis là ? répliqua l’interpellé en clignant de l’œil. Rendez-vous la nuit prochaine, chacun avec un anneau. Et tu prendras un aller simple pour le pays où vous voulez tous aller, Matthieu.

-          Pourquoi pas un aller-retour, comme d’habitude ? demanda Pauline.

-          Parce que le retour, c’est le divorce, répondit Orphée. Nous en ferons autant, Pauline.

-          Merci, Orphée, dit Matthieu, puis il embrassa sa belle.

 

La nuit suivante, Pauline se débrouilla pour avoir un petit sac, et y glisser un anneau fantaisie acheté avec sa sœur, avec l’aller simple pour le plus beau des pays, à ses yeux. Le chemin fut plus long, mais elle pensait à Matthieu, caressait son chat, et débarqua en sautant légèrement à terre. Matthieu l’attendait à la gare, un bouquet de fleurs à la main, avec sa plus belle veste, une chemise ouverte sur son torse glabre. Pauline se sentit chavirée. Elle-même avait une petite robe blanche, mais sans prétention. Orphée se frotta à ses jambes, tandis que Matthieu tendait le bouquet, avant le baiser.

-          Et maintenant, suivez-moi, vous deux ! commanda Orphée.

Pauline et Matthieu s’exécutèrent, sourire aux lèvres. Orphée les mena derrière la gare, sur une petite colline qui offrait de magnifiques saules pleureurs. D’autres arbres encore se trouvaient là, à faire comme une petite arche, un petit autel de verdure. Avant de prendre place dans un arbre, Orphée demanda à ce qu’ils posent leurs anneaux dans l’herbe, puis improvisa un petit compliment. Pauline et Matthieu étaient charmés, puis s’échangèrent des vœux et enfilèrent leurs bijoux nuptiaux, avant de s’embrasser, alors que les oiseaux chantaient.

-          Zut ! Le jour ! lança Orphée.

Pauline se réveilla la première et, à sa grande surprise, s’aperçut qu’elle était dans un grand lit, et qu’elle n’était pas seule. Il n’y avait pas qu’Orphée, elle sentait aussi une présence masculine.

-          Regarde ton annulaire, dit doucement Orphée. Et laisse Matthieu dormir...

A sa grande stupéfaction, Pauline put admirer, à son doigt, comme une alliance, la bague ornée d’une tête de chat qu’elle avait choisie avec Christelle.

-          Mais où suis-je ? souffla-t-elle.

-          Au pays de l’amour… répondit Orphée dans un murmure.

-          Oh mon Dieu…

Et Pauline se rendormit.

 

© Claire M., 2020

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