Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
l'imagination au pouvoir
8 janvier 2020

Secrets de fabrication

Secrets d’écrivain.

 

Paris-flash, janvier 2019, extrait d’interview

«   - Et maintenant, Romain Lelong, parlez-nous de votre dernier roman, Le marteau de Charles… Il s’agit d’une uchronie, n’est-ce pas ?

-          Oui, en effet, et cette fois je suis remonté loin dans l’histoire, ça n’a plus rien à voir avec les Conquistadors… Et je me suis focalisé sur ce que serait  devenue la France, si les Arabes n’avaient pas été arrêtés par Charles Martel. Tout le monde connaît la légende officielle…

-          La légende ?

-          Il faut surtout retenir que Charles Martel était le grand-père de Charlemagne. Il a eu un rôle dans l’histoire, mais pas exactement celui qu’on  croit. A sa façon, il a assis sa réputation en France. J’ai imaginé des évènements différents, qui changent toute l’histoire que nous connaissons. Charles Martel joue un rôle différent, dans ce roman. Je me suis plu à imaginer le Moyen âge, même si j’ai passé beaucoup de temps à faire des recherches sur ce sujet, et sur ce personnage.

-          Vous faites toujours beaucoup de recherches…

-          Quand on écrit des uchronies, des utopies, c’est indispensable. Mais ça n’empêche pas mon imagination de carburer, au contraire ! La difficulté me stimule.

-          Y a-t-il un personnage où vous vous retrouvez, comme souvent dans vos romans ?

-          Oui : Charles Martel lui-même ! J’aurais voulu être aussi valeureux et malin… Je l’ai remodelé à ma sauce… c’est jouissif, vous savez ! C’est pour ça que j’aime autant écrire… »

 

18 février 2019.

Bon sang, ce Marteau de Charles est excellent ! Comme d’habitude, je l’ai dévoré, tout comme j’ai avalé les dix autres romans de Romain Lelong. Mais comment fait-il pour attraper ainsi le lecteur ? J’aimerais avoir son aisance littéraire. Comment faire pour l’approcher ? Même juste parler cinq minutes avec lui… Les dédicaces, c’est bien joli, mais c’est superficiel… Moi, ça me donne envie d’écrire. Et maman et Sandra vont encore me chambrer… Elles ne peuvent pas comprendre, elles déconsidèrent la SF, l’uchronie. Seule Alice peut me comprendre, vu que c’est elle qui m’a initié à cet auteur. Je devrais l’appeler et lui demander ce qu’elle en pense. J’adore ma Sandra, mais qu’est-ce qu’elle peut être partiale, quand elle s’y met… Littérairement, nous ne nous entendons pas tant que ça. Papa dit que dans un couple, c’est normal d’avoir des divergences de vues. Bref, plus ça va, et plus je voudrais connaître mon auteur préféré. Je crois qu’il vit à Paris, ça tombe bien, puisque c’est là que je fais mes études. Peut-être en cherchant sur Internet ? S’il y a une dédicace quelque part, eh bien, j’y filerai, en aficionado que je suis… A moins qu’il ait un compte Facebook ? Mais c’est un vieux grincheux, à ce qu’il paraît… Cela dit, il doit bien avoir une adresse mail, au moins ! Je vais chercher comment faire.

21 février.

Je ne suis qu’un imbécile ! Tout Parisien avec un tant soit peu de jugeote sait que les écrivains se retrouvent au Salon du Livre, pardon, « Livres Paris », au mois de mars… Il suffit de se renseigner. Alice n’a pas répondu à mon appel, peut-être le fera-t-elle plus tard, entre deux lessives à faire tourner, et des copies à corriger… C’est bien vrai, que les profs ne s’ennuient jamais ! A moins que je leur rende une petite visite, un soir, après mes cours… Je ne vois pas tellement mes nièces, en plus, mais c’est vrai qu’elles sont souvent chez leur père. Nous devrions faire une réunion de famille… Je pourrai en parler à maman.

 

16 mars.

Ces salons me cassent vraiment les pieds… Il paraît qu’il faut être proche de ses fans, comme s’il ne suffisait pas de donner des  interviews et de sourire sur les photos… Quelle barbe. J’ai dédicacé des livres, mais je n’avais pas envie de parler, j’ai fait semblant. Je suis cent fois mieux à les écrire, en compagnie du bel Apollon. A vrai dire, toute cette presse me fait peur. Et ces petits jeunes qui me disent m’encenser. En plus, ils veulent des selfies avec moi ! Je trouve ça d’une bêtise abyssale. Je ne retiens que ce jeune homme, qui semblait avoir le cœur sur les lèvres, accompagné d’une jolie dame manifestement plus âgée que lui et qui m’a fait un sourire enchanteur. Je me souviens même de leurs prénoms : Léo et Alice. Plutôt mignons, tous les deux. Un vague air de famille, les mêmes yeux bleus. Ça a été le moment agréable de ma journée de dédicaces. Alice a dû le sentir, car elle m’a donné discrètement son numéro de téléphone. De la part d’une femme, je trouve ça culotté, tout de même. Qu’est-ce que je fais, je l’appelle ? J’hésite. Je ne veux pas d’une passade. Je peux me taper les plus belles femmes du monde, mais ça ne m’intéresse plus, ces relations sont trop superficielles. Quant à construire quelque chose, alors que je considère avoir déjà cinquante ans, je ne l’espère plus. Ecrire mes livres, pousser mes coups de gueule à la télévision et à la radio, c’est tout ce qui m’intéresse. Et de toute façon, demain je retourne au Salon, pour fureter parmi les livres, cette fois. En fait, j’en aime l’ambiance, mais à condition de ne pas être derrière une petite table à signer des autographes… Je ne suis pas la Nothomb ! Et un écrivain, ça lit…

 

 

 

18 mars.

Hier soir, je ne sais pas ce qui m’a pris, j’ai appelé Alice. Elle en a balbutié, elle ne l’espérait pas, apparemment, et en fait, elle voulait faire une surprise à son petit frère, Léo. J’ai été très étonné. J’ai toujours veillé à ne pas payer de mine, genre Houellebecq, sauf que je préfère le pyjama aux vieilles chemises et pardessus de clodo. Le petit frère me gêne un peu, mais je lui ai proposé de se voir le mercredi, boire un pot vers le quartier latin. Et… advienne que pourra !

En plus, je cherche un autre sujet de roman, mais comme je suis en promotion pour Le marteau de Charles, je n’ai guère de temps à y consacrer. Je devrai aller en province dans une dizaine de jours. Là aussi, la barbe. La partie agréable de ce métier, c’est la création… Où sont mes héros, mes amis de papier ? Charles Martel, ou toutes ces vies que j’ai imaginées ? Et si cette Alice était passée à travers  un miroir ? La perspective de la revoir, même avec son frère, exacerbe mon imagination… Mais non, Apollon suffira, il est bien réel, lui au moins. D’ailleurs, il ronronne auprès de moi… La perspective de voir du monde me fait peur, et je crois qu’il le sent. Brave Apollon ! Et maintenant, compagnon des Muses, inspire-moi…

 

21 mars.

Bon sang, j’ai rencontré mon auteur préféré ! Et tout ça grâce à Alice ! En plus, je ne suis pas idiot, elle a clairement plu à Romain Lelong… Il en était à côté de la plaque. Ou est-ce son personnage ? Il était encore plus mal coiffé que d’habitude, avec ses lunettes à la John Lennon, c’en était presque pathétique. Il avait sorti un vieux tee-shirt, comme les étudiants que je fréquente quelquefois. J’ai eu l’impression de voir un personnage de BD. Il ne nous regardait pas franchement, Alice et moi, je ne sais pas pourquoi. Il s’est déboutonné quand je lui ai demandé comment il écrivait :

-          Assis derrière mon ordinateur, jeune homme ! et il a rigolé.

-          Et de gauche à droite ! a ajouté Alice en lui faisant un sourire de connivence. Je croyais que pour vous, l’étape papier-stylo était indispensable…

-          Si, c’est vrai. Pour échafauder des mondes. Et puis si j’écris de la fantasy, il faut bien que je dessine des cartes… je vous avouerai que je les connais mieux que cette ville de Paris, qui est trop tentaculaire à mon goût. Mon arrondissement me suffit…

-          Donc nous sommes dans le vôtre ? ai-je demandé.

Il en était confus.

-          Je serais curieuse de connaître vos secrets de fabrication, monsieur Lelong.

Il en a été encore plus confus, d’autant que j’ai ajouté qu’étant étudiant en Lettres et proche des livres, cela m’intéressait doublement. Romain Lelong s’en est gratté l’oreille, et Alice m’a confié, en m’emmenant chez elle après cette rencontre, qu’elle avait profité qu’elle lui plaisait, pour m’offrir un caprice à nous deux, en fait.

-          Tu es une vraie sœur, en fin de compte, et pas qu’à moitié…

-          Mon père m’aurait dit de m’occuper de toi, même si le tien assure aussi. Mais de toute façon, nous avons toujours été très liés, toi et moi.

-          Maman n’a jamais oublié ton père. Il lui a fallu du temps pour rencontrer le mien… Mais tu t’intéresses vraiment à Romain Lelong, alors.

-          Il me fascine. Peut-être plus que toi, parce que je suis une femme.

-          Aah… mais tu veux quand même connaître ses secrets de fabrication.

-          Toi aussi, non ?

J’en convins bien volontiers. Alice me promit qu’on irait le voir, le temps de lui soutirer son adresse.

 

26 mars.

Mon Dieu, je suis en feu ! Je me suis laissé faire par Alice, et elle est venue tout à l’heure avec Léo… J’ai dû  revenir brutalement dans la réalité, moi qui la crains tellement… Ils sont venus vers six heures, alors que je cherchais l’idée d’un nouveau roman. J’étais donc perdu dans mes papiers, les livres, si bien qu’ils sont arrivés dans un beau bazar. Déjà que je déteste montrer mon antre, où mes tentatives de ménage ont toutes tourné court, et en plus à l’improviste… A leur coup de sonnette, la surprise m’a tout fait valser, et Apollon a sursauté aussi. Mais en entrant, mes deux visiteurs ont été très polis, ne critiquant pas la tenue de mon appartement. Au contraire, d’entrée de jeu, tous deux étaient fascinés. Léo me donnait envie de rire, avec son air étonné. Il fait tout jeunot, vingt-trois ans ! Sa sœur, plus brune que lui, était une fois de plus très jolie. Pris au dépourvu, j’ai bricolé un apéritif avec le peu que j’avais.

-          Vous n’êtes pas épais, monsieur Lelong… s’est inquiétée Alice, et j’ai reconnu que je mangeais mal, qu’il m’arrivait de sauter des repas, pris par l’action de mes romans.

-          Très mauvais, ça, a-t-elle encore dit, alors que Léo ouvrait des yeux comme des soucoupes. Et vous ne faillez pas à votre réputation… Moi, je crois qu’il vous manque une femme. Vous devez les avoir toutes à vos pieds, n’est-ce pas ?

Apollon, avec son sens de l’humour habituel, s’est roulé sur le tapis devant nous, et ça les a fait rire tous les deux.

-          Votre chat est très mignon. Un vrai petit soleil, a commenté Léo.

-          C’est pour ça qu’il porte le nom du dieu du soleil. Et puis c’est le plus beau…

Jusqu’au bout, j’ai espéré qu’Apollon fasse diversion. Léo l’a caressé et, à ma grande surprise, mon chat s’est laissé faire.

-          Mon père vit à la campagne, et a trois chats, m’a-t-il dit en voyant ma tête. Nous adorons les chats, les animaux, lui et moi.

-          Pas vous, Alice ?

-          Nous n’avons pas le même père. Le mien est mort quand j’étais petite.

-          Je suis désolé, ai-je balbutié.

Et la réalité a fait irruption dans mon esprit, avec la disparition de mes deux parents, dans cet accident de voiture, alors que j’avais dix ans. Je n’en ai jamais parlé dans mes interviews, racontant qu’ils étaient mieux sur la face cachée de la Lune, ce qui pouvait aussi être pris métaphoriquement. Bref, j’étais mal à l’aise. Mon grand frère et moi avons été placés dans une famille d’accueil, où les grands enfants du couple qui nous hébergeait nous ont snobés. Richard, mon frère, est le seul être humain avec qui je suis resté proche.

Un ange est passé dans mon salon, et, comme souvent quand je suis pris par les souvenirs, il m’est venu autre chose en tête. J’ai cru devoir dire quelque chose.

-          Voulez-vous visiter Rixthéa ?

-          Mais cette planète n’existe pas ! rétorqua Léo.

-          Elle existe. Tout ce que j’imagine existe. Regardez sur le mur derrière vous.

Mais mes dessins les intriguèrent plus qu’autre chose. Ainsi, nous n’étions pas  dans le même monde…J’insistai :

-          Et vous, quelle est votre planète Rixthéa ?

-          Cet appartement, monsieur Lelong, répondit Alice après une brève réflexion.

-          Mais je crois que je vois ce que vous voulez dire. C’est la face cachée de la Lune. Moi aussi je la regarde en rêvant. La Lune, je veux dire.

Je me sentis rougir, ayant l’impression d’être démasqué. Mais je voulais retourner sur la Lune, sur Rixthéa ou au Mexique, en compagnie de mes amis de papier, les seuls. Et aussi Charles Martel, un de mes nombreux alter ego.

-          Excusez-moi, vous êtes peiné ? s’enquit Alice.

-          Ce n’est rien. Je… vous vouliez connaître mes secrets de fabrication…

-          Oh oui, s’il vous plaît ! réagit aussitôt Léo.

Sa réaction m’amusa, alors je leur expliquai un peu comment je m’y prenais, précisant bien que chaque écrivain développait, avec le temps, sa propre méthode. Tous deux étaient très intéressés, posaient des questions. Léo s’est enhardi à me demander quelle était ma formation. Il a été tout étonné, quand je lui ai expliqué que j’avais étudié l’histoire à l’université, puis fait une école de journalisme.

-          Mais c’était pour mieux réécrire l’histoire, ai-je conclu, sans dire que j’aurais voulu retourner dans le passé pour retrouver mes parents.

-          C’est… fascinant, a dit Alice. Avec l’histoire, vous faites vraiment des histoires.

-          Je ne regrette pas du tout mes années d’étudiant. Et j’espère qu’il en sera de même pour vous, Léo.

Il m’a souri pour toute réponse. Je les ai fait parler d’eux aussi, tous les deux, jusqu’à ce qu’Alice se rappelle de ses filles, qui apparemment l’attendaient à la maison. Ils ont pris congé, confus tous deux. Mais si j’ai serré la main de Léo, j’ai fait un baiser franc sur la joue d’Alice. Elle a un peu rougi, mais a fait comme si de rien n’était. Ça ne fait rien, j’ai son numéro de téléphone…

14 avril.

Je suis revenu de la province... et mon premier soin a été, une fois avec le bel Apollon, d’appeler Alice. Elle a répondu présente, et je l’ai retrouvée, le cœur battant la chamade, comme un gamin, là où nous avions pris un pot avec son frère. Je n’en reviens toujours pas, de ma part. Tout d’un coup, j’étais plus propre, bien peigné, de nouvelles baskets aux pieds. Je n’ai pas eu de vraie histoire depuis plus de dix ans… Je l’ai retrouvée rayonnante, dans une petite robe orange.

-          Monsieur Lelong ! Quel plaisir de vous revoir !

Je lui ai maladroitement tendu mes fleurs, et elle est devenue aussi rouge que mes tulipes.

-          Il ne fallait pas !

-          Je vous trouve très… jolie, ai-je balbutié. J’essaye de redescendre de Rixthéa… ou de la Lune, où on est fort bien, vous savez. Excusez-moi si j’ai l’air empoté…

-          Pas du tout !

-          Vous avez le droit de m’envoyer promener… je ne suis qu’un vieux râleur.

-          Vieux ? Mais vous vous êtes fait beau… Excusez-moi, mais quel âge avez-vous ?

-          Pas loin de cinquante ans.

-          Non, en vrai. Seriez-vous plus coquet que moi ? J’ai trente-sept ans.

-          Alors, fis-je en essayant de paraître naturel, j’ai quarante-huit ans.

-          Je me disais bien que vous ne faisiez pas votre âge. Je ne savais pas que les coquetteries d’écrivain allaient jusque là…

-          Je me suis rendu compte que j’étais dans ma bulle. Je veux bien faire un effort et redescendre sur Terre. Pour vous. Tout le temps que j’ai été absent de Paris, j’ai pensé à vous.

Alice m’a regardé, a baissé le nez sur les tulipes, et puis le serveur est arrivé pour nous tirer d’embarras tous les deux.

-          Remarquez, ça me fait plaisir, me dit-elle une fois que le serveur a eu le dos tourné. Moi aussi j’ai pensé à vous.

Je lui ai pris une main pour dire de se tutoyer, et Alice s’est laissé faire. Je ne comprenais rien à ce qui m’arrivait, sa peau était si douce ! Je n’avais qu’une envie : que le temps s’arrête pour que nous restions ainsi, elle et moi.

-          Veux-tu voyager sur la Lune, sur Rixthéa avec moi ?

-          Et sur les sept mers et même ailleurs, m’a-t-elle répondu en souriant. V... tes romans me permettent de quitter un peu ce monde.

-          Et si j’écrivais sur nous ? ai-je tenté.

-          Non, ne l’écris pas. Vivons-le.

Mon carnet d’idées me démangeait, mais j’ai préféré ne pas l’écouter…

 

25 février 2021.

Je suis le plus heureux des hommes : j’ai deux belles-filles, de grandes adolescentes fantasques qui chamboulent notre appartement, et Alice attend un heureux événement, ce que je n’espérais plus. J’ai fêté aujourd’hui mes cinquante ans, avec les miens, tous les miens : Richard et sa petite famille, Alice et Léo et celles que je considère un peu comme mes filles. En revanche, j’ai gardé mon antre, pour moi, rien que pour moi, où je me balade sur la Lune, mais aussi partout où j’installe mes romans. Après Le marteau de Charles il y a deux ans, je vais proposer à mon éditeur un roman sur le Maître du Temps, pour lequel je ne suis pas sûr du titre. Cette fois, je me suis intéressé à la physique… même si je me sens moi-même maître de l’espace, en réalité !

 

© Claire M., 2019

Publicité
Publicité
Commentaires
l'imagination au pouvoir
  • Entrez donc dans l'un des royaumes de l'imagination, la mienne, où vous croiserez êtres fantastiques, âmes en peine, beaucoup de chats... Vous pourrez y trouver d'autres aventures, ou jouer avec moi, les mots... Le continent des lettres est si vaste !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité